De façon régulière, des publications de demandes de marques étonnantes ont été signalées sur le pMdM. Dans cette lignée, voici une série de marques insolites qui dénotent dans le paysage : alors que le marketing incite naturellement à véhiculer des messages positifs et valorisants, on trouve parfois des marques dont la signification est clairement négative.
Mais surprenant ne signifie pas toujours arbitraire. Sur un plan juridique, on peut rester perplexe quant à la validité de certaines de ces marques. On sait en effet que, d’une part, sont dépourvus de caractère distinctif « les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, (…), la destination, la valeur (…) du bien ou de la prestation de service« . Et d’autre part ne peut être adopté comme marque ou élément de marque un signe « de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité (…) du produit ou du service« . Autrement dit : si les produis ou services sont vraiment mauvais, la marque constituée d’un terme qui les dépeint ainsi est nulle car descriptive et à l’inverse s’ils sont en fait de bonne qualité, la marque est déceptive.
- Premier exemple : au sens figuré comme au sens propre, l’expression traduite dans la marque ci-dessous évoque un faible niveau de qualité et de valeur.
- Dans un autre registre, l’étymologie du mot « enfoiré » ne semblait pas le prédestiner à identifier des produits de beauté.
- La marque, en tant qu’élément du discours marketing, est censée faire une promesse au consommateur : celle d’un bénéfice ou d’une qualité. Avec la marque ci-dessous, on ne vous promet rien du tout, si ce n’est une façade.
- Dans le cas suivant, le message est très clair et on peut penser que la marque n’est pas valable. Pourtant l’INPI a accepté cette marque à l’enregistrement. Avec une explication légèrement capillotractée, je crois pouvoir montrer pourquoi.
Il faut pour cela revenir à l’essence même de la théorie de la Freihaltebedürfnis. La raison pour laquelle certains signes ne peuvent être monopolisés par un seul acteur économique réside dans le besoin qu’ont ses concurrent de pouvoir en faire librement usage afin de décrire leur propres produits ; ces signes doivent rester libres, à disposition de tous. Or quel fabricant de bijoux, d’objets d’art, de linge ou de vêtements aurait donc besoin de dire que ses produits sont minables ? Ce serait évidemment absurde. CQFD.
- Les produits « Vite fait mal fait » sont ici ceux des classes 14, 18, 24 et 25.
- Il y avait la méthode improvisée, dite à la va comme je te pousse. Voici désormais des produits et des services « à la Fuck You ».
La suite au prochain numéro. Pour les plus impatients, les archives du pMdM contiennent d’autres exemples de marques ou enseignes dans le même genre : Chez Dégueu, Chez Dégueulasse, Aux Fruits Pourris, Le Vin De Merde, Au Pain Dégueulasse.