Dans les affaires de liens publicitaires, rares sont les cas où la problématique des requêtes larges (broadmatching) est examinée de façon claire et approfondie. Alors que ce type de requêtes est au coeur d’une affaire opposant 2L Multimedia à Meetic, l’ordonnance de référé rendue le 17 septembre 2008 traduit une approche déroutante.
Les faits sont simples : des liens publicitaires au bénéfice de Meetic apparaissent quand la marque d’un concurrent (2L Multimedia, demandeur à l’instance) est saisie par un internaute dans une recherche sur Google. Meetic n’a pas réservé ces mots clés sur AdWords pour déclencher les annonces litigieuses, ce que le Directeur Juridique de Google (absent de l’instance) certifie dans une attestation.
Autrement dit si les termes litigieux (marques du demandeur) déclenchent l’affichage des annonces litigieuses, cela est du au fonctionnement du système AdWords et non à un acte de l’annonceur qui est en défense. Le système des requêtes larges peut être déjoué par une mise en « mot clé négatif » de certains termes par l’annonceur.
C’est ce qui a été fait dès le lendemain de la notification de l’assignation. Selon l’ordonnance de référé, l’annonceur n’est coupable de rien car sa responsabilité civile ne peut être retenue pour défaut de « mise en mot clé négatif ». Cette partie de la décision ne pose pas de souci.
Par contre, le juge estime devoir aller plus loin et affirme de façon étonnante qu’il « appartient [aux titulaires de marques] s’ils ne veulent pas que leurs signes servent à l’apparition de liens commerciaux en faveur d’autres personnes de les mettre eux-mêmes en mots clés négatifs, le titulaire d’une marque ayant une obligation de défense de cette dernière. »
L’« Obligation de défense » des marques est une expression qui ne manque pas de surprendre sur un plan purement juridique. De quelle disposition du Code de la Propriété Intellectuelle est-elle issue ? Cette expression est d’autant plus étrange qu’elle sonne comme un reproche à un titulaire de marque qui a engagé une action judiciaire pour faire condamner les atteintes à sa marque !
A en croire la motivation de l’ordonnance, il faudrait que les titulaires de marques inscrivent en mots clés négatifs leurs marques auprès de Google.
En termes de stratégie judiciaire il est également étonnant que :
- Google fournisse une attestation qui pourrait être comprise comme un aveu
- Le demandeur n’ait pas appelé Google en cause
Références :
Tribunal de grande instance de Paris Ordonnance de référé 17 septembre 2008 2L Multimédia / Meetic
http://www.legalis.net/jurisprudence-decision.php3?id_article=2445
il est impossible de se desabonner