La clause de réparation envisagée à l’article 110 de la Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) a été censurée par le Conseil Constitutionnel au motif que l’amendement qui a introduit ces dispositions constitue un cavalier législatif.
Cette clause visait à limiter ou paralyser les effets des droits d’auteur et ceux de l’enregistrement de dessins & modèles français se rapportant à certaines pièces de véhicules ou de remorques. Elle avait été adoptée en deuxième lecture par l’Assemblée Nationale le 19 novembre 2019.
Il faut souligner que le principe de la clause de réparation constitue un point sur lequel la Directive 98/71 n’a jamais pu aboutir : pour que la Directive puisse être adoptée, il avait été retenu de prévoir des dispositions transitoire à l’égard de cette exception (article 14, qui énonçait un principe dit « freeze-plus »).
Les Etats Membres appliquaient donc des solutions hétérogènes. Cet échec de l’harmonisation a conduit à ce que la Cour de Justice de l’Union Européenne soit saisie de questions préjudicielles (arrêt du 20 décembre 2017, rendu dans les affaires jointes C397/16 et C-435/16).
L’article 110 de la LOM (dont le numéro fait étrangement écho à la structure du Règlement 6/2002 ) constituait la tentative la plus récente et la plus aboutie pour introduire en droit français ce type d’exception aux droits conférés par l’enregistrement de dessins ou modèles. Précédemment, l’introduction d’une clause de réparation (recommandée en 2012 par le Conseil de la Concurrence) avait été évoquée et à chaque fois écartée lors de discussions sur divers projets ou propositions de lois.
Par une décision rendue le 20 décembre 2019, le Conseil Constitutionnel a considéré que l’adoption de l’article 110 de la LOM n’était pas intervenue de façon constitutionnelle et a donc déclaré cet article inconstitutionnel. Cette partie de la décision est motivée comme suit :
55. Aux termes de la dernière phrase du premier alinéa de l’article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l’application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ». Il appartient au Conseil constitutionnel de déclarer contraires à la Constitution les dispositions introduites en méconnaissance de cette règle de procédure. Dans ce cas, le Conseil constitutionnel ne préjuge pas de la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles.
(…)
62. L’article 110 modifie le droit de la propriété intellectuelle applicable aux pièces détachées visibles pour automobiles. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l’article 29 qui habilitaient le Gouvernement à légiférer par ordonnances pour améliorer le contrôle du marché des véhicules et des engins mobiles non routiers à moteur ni avec celles de l’article 31 qui l’habilitaient à modifier par ordonnance les dispositions du code de la route relatives aux procédures applicables aux véhicules mis en fourrière ainsi qu’à la gestion de ces véhicules.
63. Ces articles ne présentent pas non plus de lien, même indirect, avec aucune autre des dispositions qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat, modifié par la lettre rectificative mentionnée ci-dessus.
64. Sans que le Conseil constitutionnel ne préjuge de la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles, il y a lieu de constater que, adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires.
(…)
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. – Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi d’orientation des mobilités :
(…)
– les articles 7, 49, 104, 109 et 110.
(…)
Référence : Décision n° 2019-794 DC du 20 décembre 2019 – Loi d’orientation des mobilités ; Non conformité partielle